Spécial Centenaire de l’Armistice: lettres de novembre 1918 – courrier du 12 novembre

     (P4 bis- 6 sur 12)                                    

Photo en tête d’article : place Stanislas à Nancy, le jour de l’Armistice     

Le 12 novembre 1918                       Jean, heureux d’être « quitte, sain et sauf » ! 

Mes Bien Chers Parents,

Vous dire la joie qui règne ici depuis 2 jours est indescriptible, l’enthousiasme et le merveilleux esprit sont réellement admirables chez toutes les troupes qui rallient la capitale Lorraine depuis la signature tant attendue. Une semblable tenue chez tous ces soldats et cette population qui ont tant souffert et qui voient tout à coup la fin du cauchemar sont de bonne augure pour les beaux jours qui vont maintenant s’ouvrir pour nous. La révolution dont personne ne parlait et qu’en silence on craignait est certes bien conjurée.

Evidemment ce n’est pas encore le retour mais nul ne songe à s’en plaindre.

J’avais certes une très grande confiance lors de ma dernière permission et j’avais la certitude qu’avant la fin de l’année nous serions hors des frontières mais tout de même je n’avais pas osé espérer un triomphe aussi rapide et un anéantissement aussi complet des boches.

Nous sommes en grands préparatifs pour l’occupation pour laquelle on constitue des unités d’élites et jusqu’ici je dois en faire partie avec destination approximative « Mannheim », quelle aubaine, ce n’est pas le soleil de la Côte d’Azur que nous y trouverons certes pour la saison d’hiver mais quelle joie de penser que nous allons à notre tour un peu nous imposer chez ceux qui nous ont tant fait de mal depuis 4 ans.

Le mouvement commencera certainement bientôt sur les talons du boche qui n’aura pas eu le temps d’évacuer assez vite et qui se fera certainement ramasser en quantité.

Je n’ai jamais vu une telle fête qu’hier à Nancy, c’est une journée que je ne pourrai, je crois, jamais oublier ; tout est décoré même nos voitures sur lesquelles flottent de magnifiques petits drapeaux.

Inutile de vous parler de l’éclairage  majestueux, quoi que de fortune, qui a fait place à la complète obscurité habituelle dès le premier soir, on croit rêver en voyant cela.

Chez vous la joie, quoi que tout aussi grande, a dû être moins exubérante qu’ici où toutes les troupes qui se massaient pour bondir sur le boche s’il n’avait pas signé, ont été lâchées dans la grande ville où Guillaume n’a jamais pu entrer  malgré les fameux préparatifs qu’il avait faits à la bataille du Grand Couronné de Septembre 14.

En tout cas maintenant j’en suis quitte, sain et sauf, et toujours en bonne santé. 

 

Je vous embrasse tous de tout mon cœur bien fort et bien tendrement.

Votre petit aviateur qui vous aime bien.

Jean Genin

 Ci-dessous: plusieurs photos d’avions allemands capturés et exposés sur la place Stanislas de Nancy – 1917-1918 

 

 

 

 

 

Ce retour de l’Alsace-Lorraine dans le giron français n’est pas sans poser quelques questions. Faut-il un référendum auprès de la population ? Est-ce un juste retour qui s’impose sans discussion ? 

Voici un article très complet sur la question, écrit dans « La Revue d’Alsace » (Fédération des Sociétés d’Histoire et d’Archéologie d’Alsace)  par Joseph Schmauch en 2015 :

https://journals.openedition.org/alsace/2379

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