Aux Ateliers, on s’ennuie

Dijon – le 16 août 1914    (P1-5 sur 7)

Chers Parents,

Voilà encore une semaine de passée et rien de nouveau est venu changer ma situation. Jusqu’à hier j’espérais encore pouvoir aller vous voir mais je crois qu’il va falloir y renoncer. Cela nous est très difficile pour voyager et encore faut il des cas de force majeure.

Il semble ici que tout le monde se soit habitué à la guerre maintenant, la ville n’a plus la même animation que les premiers jours, il semble que cela a toujours été.

En raison de l’absence de travail aux ateliers on n’a travaillé ni hier ni aujourd’hui. Un service de garde a simplement été organisé pour répondre au peu de courrier et être en permanence au téléphone.

Aussi durant ces 2 jours je me suis passablement ennuyé d’autant plus qu’il fait un temps épouvantable.

Aux ateliers pour passer le temps que nous avons de libre, nous avons placardé de grandes cartes sur lesquelles chaque jour nous suivons les opérations en plantant des petits drapeaux représentant les régiments. Tout le monde s’y intéresse, contremaîtres, s/chefs et même le Chef, Mr Fyot.

Tous les soirs l’on va en ville lire les dépêches et voir les journaux de Paris.

Il y a déjà des blessés à Dijon et hier j’en ai vu en gare que l’on dirigeait sur le midi, tous le sont en général peu grièvement. J’ai causé avec plusieurs d’entre eux et tous répètent le même refrain, c’est l’infériorité de l’armée allemande sur l’armée française sous tous les rapports , sauf cependant sur la rapidité du tir au fusil.

Un fait cependant les a tous frappés c’est la nullité de leurs tirs d’artillerie. Les obus lancés par l’artillerie lourde allemande, et pesant plus de 100 t s’enfoncent tous dans la terre sans éclater.

Je ne sais encore si le service des colis postaux va reprendre après la mobilisation mais je m’en assurerai et dans l’affirmative je vous écrirai les affaires dont j’ai besoin et que vous pourriez m’envoyer. Néanmoins je peux faire avec ce que j’ai car je me suis acheté ce qui me faisait trop défaut.

Je ne me suis pas commandé mes souliers, j’attends de savoir si je pars car j’ai fait ma demande pour repasser le conseil.

Je vous embrasse bien fort.

Jean Genin

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