(P4- 31- Verdun 10)
Photo JG en tête d’article : « Chasse aux poux des poilus »
Le 23-4-1916
Mes Bien Chers Parents,
Il y a 1 mois hier que nous arrivions dans cette formidable bataille de Verdun et ce premier jour nous commencions à avoir la pluie qui, depuis, nous a tant fait souffrir.
Aujourd’hui jour de Pâques je n’ai pas, comme vous devez bien le penser, célébré cette fête comme je l’aurais voulu en raison de l’impossibilité matérielle, mais néanmoins j’ai bien été uni à vous dans mes prières toute la journée.
Par un hasard extraordinaire nous n’étions pas en ligne aujourd’hui comme depuis 2 jours d’ailleurs, mais malgré cela nous sommes presque plus malheureux qu’aux tranchées, nous n’avons plus aucun abri et sommes abandonnés dans les bois à coucher dans la terre sous la toile de tente. Mais cet après-midi où nous avons eu le bonheur de voir un peu de soleil, j’ai eu également la consolation de pouvoir faire une petite visite dans une église d’un petit pays vers lequel j’ai pu m’échapper quelques instants.
En outre je crois que nous allons bientôt nous reposer un peu, ce qui ne sera pas trop tôt mais il ne faut pas trop se réjouir à l’avance.
Je vous renvoie ci jointes les lettres des 13 et 16 ainsi qu’il était convenu.
Comme objet dont j’aurais un besoin urgent, surtout si nous allons pour quelques jours à l’arrière, ce serait un insecticide puissant destiné à une toilette approfondie dont nous avons tant besoin. Il est en effet malheureux d’avouer l’état de malpropreté dans lequel on est tombé fatalement par suite de la vie que l’on mène. Je compte donc sur vous pour m’expédier le plus tôt possible, ce que vous trouverez permettant de se débarrasser le plus promptement possible des parasites dont nous sommes accablés.
A par cela je suis toujours en bonne santé et en attendant de vos nouvelles je vous embrasse tous de tout mon cœur bien fort et bien tendrement
Votre petit officier qui vous aime
Jean Genin
3 Photos JG ci-dessus : « Les installations de fortune des cantonnements dans les bois »
comment ne pas ressentir la détresse de ces hommes, rien que de penser que ces garçons vivaient dans la boue, avec les rats, sans trop de nourriture et avec les explosions partout autour d’eux, ils devaient avoir une peur affreuse. De plus cette invasions de poux sans pouvoir se laver ; mon Dieu, pourquoi n’apprenons nous pas aux enfants à connaitre ces terribles moments, car s’ils sont si choyés actuellement ils peuvent dire un grand merci à tous ces hommes qui ont laissé, non seulement leurs vies pour certains ; mais aussi leurs âmes pour beaucoup d’entre eux blessés à vie toute une jeunesse sacrifiée !